Kayane, combattante e-sport

HEROES

Depuis 20 ans, Kayane excelle dans le monde de l’e-sport. Spécialisée dans les jeux vidéo de combat, elle prône des valeurs positives comme le respect, l’humilité, le partage. Une combattante opiniâtre, bien déterminée à prouver que les femmes aussi peuvent briller.

Portraits
HEROES #7 - KAYANE

Dans l’antre de Kayane, il y a des figurines, des sticks arcade, des peluches mais aussi une multitude de trophées, souvenirs précieux de tournois et un set-up pro tout récemment installé. Un espace de travail qu’elle a confectionné à son image. Lorsqu’elle ne s'entraîne pas ou ne stream pas, elle organise les “Kayane Session”, où elle invite ceux qui le souhaitent à participer, échanger, apprendre tous ensemble.

Kayane, e-sport combatif
Kayane, e-sport combatif

Quel est ton premier souvenir de jeu vidéo ?

J'ai commencé à l'âge de 4 ans sur des jeux fun type Mario et Tetris mais j'ai vraiment accroché lorsque j'avais 7 ans et que j'ai commencé les jeux de combat grâce à mes grands frères. Ils m'ont initiée à SoulCalibur sur Dreamcast. J'ai eu un gros coup de cœur pour un personnage féminin qui s'appelle Xianghua. J'avais envie de devenir comme elle, c'était un peu un modèle, je la trouvais belle, forte. Je voulais vraiment incarner ce type de personnage. 

Est-ce que ça a été difficile d’allier ta passion pour les jeux vidéo et ton parcours scolaire ? 

J'ai commencé les tournois très jeune, à l'âge de 9 ans. Il fallait vraiment que je convainque mes parents de continuer les tournois, et pour ça, je devais avoir de bonnes notes !

Dans ma tête, pendant très longtemps, je me suis dit que je n’allais jamais vivre de ma passion parce que mes parents m'ont convaincue de ça. J'ai fait un bac S et puis j’ai continué avec un DUT techniques de commercialisation, puis une école de commerce. Mais à côté, j'avais très peur pour mon avenir, même si j'étais devenue quelqu’un dans le monde des jeux vidéo, j'étais quasiment convaincue que je ne pourrai pas en vivre. 

Et puis à cette période-là, en école de commerce, j'ai été contactée par Game One, la chaîne de télé que je regardais quand j'étais petite. J’étais à l’école et en même temps animatrice télé et c'est là que je me suis dit « j’ai carrément moyen de vivre de ce milieu-là ».

Streameuse et cheffe d'entreprise digitale
Streameuse et cheffe d'entreprise digitale

Comment as-tu réussi à atteindre un tel niveau dans le jeu vidéo de combat ?

Mes frères m’ont entraînée vraiment à la dure et m’ont transmis toutes leurs connaissances, on jouait énormément pour s'entraîner. J'ai pu progresser très vite avec les tournois presque tous les week-ends et les sessions offline. 

À l'époque il n'y avait pas YouTube ni Twitch, il n’y avait pas tous ces réseaux qui permettaient d'échanger des techniques. Il y avait quelques forums et on discutait à travers ça. Quand on rencontrait des joueurs étrangers en tournoi, on avait l'impression de découvrir une nouvelle façon de jouer. Maintenant, c'est beaucoup plus simple de progresser. 

Tu participes à des tournois, mais tu en organises aussi avec les "Kayane session" ?

J'ai commencé à organiser des tournois, des événements lorsque j'avais 17 ans. J'avais peur qu'on perde cet aspect réel, cet aspect où on va vers les gens, on rencontre les gens et on joue ensemble, on progresse ensemble. Et moi, j'ai été éduquée comme ça dans les jeux de combat. Chaque week-end, on avait des tournois, on se voyait physiquement, on allait chez des joueurs et on s'entraînait avec les joueurs. Et c'est à ce moment-là que j'ai organisé les "Kayane session". 

Douze ans après, on en organise toujours. Maintenant, j'ai mes propres consoles. J'ai investi dans énormément de matériel pour fournir tout le confort aux joueurs.

Actuellement, j'ai participé à une centaine de tournois et j'ai 67 podiums, donc ce n'est pas arrivé par hasard, c'est que vraiment, je me suis acharnée pendant 20 ans, et c'est ça qui fait plaisir.

C’est difficile d’être jeune et d’être une femme aujourd’hui dans l’e-sport ?

Lorsque j'ai commencé les tournois, je m'attendais à me faire plein d'amis. Et quand je suis arrivée, la plupart des joueurs me regardaient bizarrement. À l'époque, les joueurs étaient deux fois, voire trois fois plus âgés que moi. Et déjà, j'avais l'impression de devoir me battre à la fois pour les enfants et à la fois pour les filles. Je prenais deux fois plus de critiques, et c'était assez douloureux et difficile au début. L’un des objectifs de ma vie, c’était de pouvoir très vite prouver que j'avais ma place, être du même niveau qu’eux en étant une fille et un enfant. Et pour le prouver, ce sont les résultats qui comptent.

La passion, moteur de la victoire
La passion, moteur de la victoire

Actuellement, j'ai participé à une centaine de tournois et j'ai 67 podiums, donc ce n'est pas arrivé par hasard, c'est que vraiment, je me suis acharnée pendant 20 ans, et c'est ça qui fait plaisir. 

Est-ce que maintenant ça change ?

Aujourd'hui, le regard a beaucoup changé. Peut-être parce que dans la communauté des jeux de combat, je suis un peu comme la grande sœur, même parfois une maman pour les joueurs. Et il y a beaucoup de personnes qui, en voyant une fille, je pense, ne pourraient pas vraiment la sous-estimer parce qu’ils se diront « Maintenant, en France on a Kayane, elle a prouvé depuis sa plus tendre enfance qu’on peut y arriver”. En France, on a beaucoup de joueurs qui ne vont pas sous-estimer les filles. 

J'essaie de vraiment faire attention aux filles, J'essaie de les mettre à l'aise, de discuter avec elles. Quand elles sont nouvelles, leur dire que si jamais il y a un problème, elles peuvent toujours compter sur moi. Les joueurs, je pense qu' ils n’ont pas envie de m'avoir comme ennemie (rires).

Tu as d’autres passions en dehors du jeu vidéo ?

  • Entre Japon, jeux vidéo…
    Entre Japon, jeux vidéo…
  • Et compétition
    Et compétition

Je fais du piano, j'apprends le japonais dans une école associative, j’aimerais pouvoir travailler avec des compositeurs, des producteurs de jeux vidéo japonais, et pouvoir le faire sans interprète. Et à côté de ça, je fais de la boxe thaïlandaise, c'est passionnant et ça me permet de faire un rapprochement entre sport de combat et jeux de combat. 

Quand je joue, en particulier en tournoi, ce n’est pas qu’un combat contre mon adversaire, c'est aussi contre moi-même.

Qu'est-ce que tu ressens quand tu joues ?

Je trouve que les jeux de combat, on est souvent strict avec soi-même. Il y a aussi une sorte de relation qui se crée entre soi et le personnage que l’on choisit. On peut apprécier son caractère, son charisme, c’est quelque chose qui nous booste dans l'entraînement ou dans l'envie de le mener le plus loin possible. On a une certaine rigueur à avoir, beaucoup de patience, de la concentration et une dextérité aussi pour manipuler le stick arcade ou la manette. On doit avoir beaucoup de mémoire.

Cela se travaille énormément, on ne s'en doute pas forcément quand on parle de jeux de combat ou de jeux vidéo, mais il y a tout ce travail à faire en amont. Et moi, quand je joue, en particulier en tournoi, ce n’est pas qu’un combat contre mon adversaire, c'est aussi contre moi-même. 

C'est pour ça que je fais aussi beaucoup de sport à côté. J'ai l'impression d'être plus zen et posée quand je dois jouer un jeu de combat. Et quand on réussit à gagner un match dans un dans un tournoi, c'est beaucoup de fierté qui ne dure pas longtemps. Mais pour ces dix secondes de joie, quand on gagne un match, on se dit "j’ai atteint mon objectif”. 

Ton meilleur souvenir de compétition ?

Mon meilleur souvenir de compétition, c'était lors de l'EVO 2019, qui est le plus grand tournoi au monde de jeux de combat. J'ai réussi à me qualifier parmi les finalistes de cette compétition sur SoulCalibur 6, C'est mon jeu de cœur et c'était la première fois qu'une femme arrivait à ce stade-là.   

Il y avait 800 joueurs dans ce tournoi et je devais affronter pas mal d’adversaires tout au long de la journée. Il y avait un joueur coréen que je devais affronter pour aller sur la scène. Pendant le combat, il y a eu 1 partout. Mon cœur a commencé à battre la chamade, je me disais « je suis à un match de faire le top 8, c'est mon rêve sur ce jeu-là”. 

J'ai réussi à le battre, j'ai sursauté, j'ai jeté le stick arcade sur la table. J'étais trop contente ! J’ai fait un câlin, le public s'est levé pour m’applaudir. J'ai l'impression d'avoir vraiment concrétisé le rêve de toute ma vie de joueuse. 

On joue ensemble et on apprend ensemble. Et c'est ça aussi que je veux montrer.

Avec la compétition, tu fais beaucoup de stream. C’est un moyen d’être proche de ta communauté ?

Je trouve que c'est très important maintenant de streamer et d'être proche de son public aussi. Il ne faut pas oublier que je fais du jeu de combat, et souvent les gens me donnent une image où je suis un peu intimidante pour eux, parce que c'est de la baston. Peut-être qu’ils s'imaginent que je n'ai pas le temps à perdre, qu’ils vont me déranger, ou je ne sais pas. Mais ce n’est pas vrai du tout. Je suis très contente d'aller au contact des autres.

  • Stream détendu…
    Stream détendu…
  • Mais explosif
    Mais explosif

On joue ensemble et on apprend ensemble. Et c'est ça aussi que je veux montrer. J'essaie le plus possible d'être proche des gens pour les initier à ce genre que moi j'adore.

Quels conseils tu donnerais à ceux qui voudraient justement se lancer et se dire je veux vivre de ma passion ?

Pour tous ceux qui veulent vivre de leur passion, il faut oser. Souvent on a son cœur qui nous dicte de faire des choses et on a toute une pression sociale qui peut nous empêcher de vivre heureux. Et même si c'est un échec, au moins on aura tenté des choses et on peut aller de l'avant. Il faut aussi prendre les échecs comme des expériences et des choses qu'il ne faut pas réitérer. Et peut-être refaire les choses, mais d'une meilleure façon.

Suivre son cœur
Suivre son cœur

Quels sont tes projets ? 

J'aimerais continuer à faire ce que je fais, toujours mieux, c’est ça les compétiteurs. On a une toute nouvelle génération de console maintenant. Moi, j'ai super hâte de voir les nouveaux jeux de combat qui vont sortir et je pense qu'il y aura des jeux qui vont vraiment changer notre vie. Je suis sûre qu'il y aura des nouvelles façons de jouer à des jeux de combat et c'est ça qui est excitant.

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